De nouveaux témoignages glaçants recueillis dans le village de Ntoma révèlent l’utilisation macabre de certaines habitations et lieux de culte abandonnés par les civils dans la localité de Kilia, en territoire de Beni. Selon les récits de rescapés et d’autorités locales, des maisons désertées ont servi de prisons improvisées, de dépôts de vivres et de scènes d’exécutions sommaires orchestrées par les rebelles ougandais des ADF entre 2020 et 2021.
L’une de ces habitations, désormais en ruine, se dresse comme un vestige silencieux des atrocités commises. Sur place, le journaliste Trésor Kapepela Ben a pu constater l’ampleur du drame. À l’intérieur de cette modeste demeure, une pièce exiguë de deux mètres carrés révèle encore plusieurs effets personnels : de vieux vêtements de civils, laissés derrière eux.
« Les ADF amenaient les otages ici, certains étaient déshabillés avant d’être conduits dans une vallée voisine pour y être exécutés », raconte un chef de colline local. Il ajoute que certains captifs auraient été mis à mort nus, ligotés à l’aide de simples moustiquaires, dans une brutalité indicible.
Au fond de la pièce, une quantité notable de riz paddy gît encore. Il aurait été stocké par les rebelles, utilisé comme vivres de base.
« Ce riz appartenait aux ADF. Les otages étaient forcés de le piler avant de préparer les repas dans ce bastion », précise le même témoin.
Le chef du village, Andela Kalambongo, identifie la maison comme celle de Maman Élisa, une habitante qui avait fui au début des attaques. Son sort, tragique, illustre la vulnérabilité des civils dans cette région.
« Elle s’était réfugiée à Bulongo, mais elle a été tuée là-bas lors d’une autre incursion des ADF », confie-t-il.
Non loin de cette habitation, les habitants ont récemment mis au jour des restes humains : des crânes et ossements en grand nombre. Il s’agirait, selon les autorités locales, de dépouilles d’otages exécutés et abandonnés à proximité.
L’Église des Frères de Ntoma, tout proche, n’a pas été épargnée. Elle aussi aurait servi de refuge temporaire aux rebelles, selon plusieurs sources locales. Ces révélations jettent une lumière crue sur l’occupation silencieuse et meurtrière menée par les ADF dans les villages abandonnés du Nord-Kivu.
Alors que les opérations militaires se poursuivent dans la région, les populations déplacées attendent toujours un retour sécurisé dans leurs localités et la fin d’un cycle de violence qui, depuis des années, saigne la région de Beni.
Rédaction
