Un nouveau drame vient de plonger la République Démocratique du Congo dans le deuil et l’indignation. Dans la nuit du 26 au 27 juillet 2025, des combattants présumés des Forces Démocratiques Alliées (ADF), un groupe armé ougandais affilié à l’État islamique depuis 2019, ont attaqué une église catholique à Komanda, massacrant plus de 40 fidèles dont plusieurs enfants à coups de machettes, d’armes à feu et de barres de fer. L’attaque, d’une violence indicible, s’est déroulée à quelques kilomètres seulement des positions de l’armée congolaise (FARDC) et de la mission onusienne MONUSCO, sans qu’aucune intervention n’ait eu lieu à temps.
Une barbarie ritualisée dans le silence
Les témoignages recueillis par Human Rights Watch et confirmés par des habitants de Komanda font état d’un raid brutal aux premières heures du 27 juillet. Les assaillants ont pénétré dans l’enceinte de l’église, où des familles passaient la nuit après une veillée religieuse.
“Ils nous ont fait asseoir, puis ont commencé à frapper les gens à la nuque. J’ai fui avec quatre autres”, raconte un survivant.
Au moins 33 personnes ont été tuées sur place ou sont mortes de leurs blessures. Des dizaines de maisons et kiosques ont été incendiés.
Le bilan humain s’alourdit à mesure que les informations se précisent : 43 morts, 9 enfants enlevés, plusieurs blessés et d’autres disparus. Certains enfants auraient réussi à s’échapper selon des sources locales.
Une réponse militaire absente, une protection civile en ruine
Ce massacre met une fois de plus en lumière les limites structurelles de la stratégie sécuritaire en Ituri, malgré la loi martiale imposée depuis avril 2021. L’armée congolaise, positionnée à seulement trois kilomètres, et la MONUSCO, présente à un kilomètre, n’ont pas réagi au moment de l’attaque. Des problèmes de réseau sont évoqués, mais pour la population, cela sonne comme un nouvel abandon.
“Personne n’est venu. Ni l’armée, ni la police, ni les Casques bleus. Ils sont arrivés après, pour constater les dégâts”, dénonce un acteur de la société civile locale.
L’échec d’une stratégie sécuritaire conjointe
La coalition militaire FARDC–UPDF (armée ougandaise) dans le cadre de l’opération Shujaa, lancée en 2021, n’a pas permis d’endiguer les violences. Pire encore, selon certains analystes, cette pression militaire aurait simplement déplacé les zones d’opération des ADF vers d’autres bastions, plus profonds, en Ituri.
Le Bureau conjoint des Nations unies signale que les attaques imputées aux ADF ont causé plus de 200 morts rien qu’en janvier 2025, un triste record. Et selon les experts, le mois de juillet a vu 82 nouvelles victimes civiles, notamment à Beni, Lubero et désormais Komanda.
Une communauté internationale en sursaut… mais sans levier
Les condamnations officielles n’ont pas tardé. Le gouvernement congolais parle d’un “massacre à grande échelle”, MONUSCO évoque une “situation humanitaire extrêmement préoccupante”, et la Conférence épiscopale catholique du Congo s’est insurgée : “Comment expliquer un tel drame dans une province sous état de siège, appuyée par deux armées et une mission onusienne ?”
À l’échelle internationale, Human Rights Watch appelle à une enquête indépendante et publique, ainsi qu’à une refonte urgente de la stratégie de protection civile dans l’est du pays. Le Conseil de sécurité de l’ONU et l’Union africaine sont appelés à “cesser les déclarations creuses” et à pousser vers une solution politique et militaire cohérente.
Une justice à activer, une confiance à reconstruire
Des promesses ont été faites : une enquête judiciaire militaire est annoncée, des troupes supplémentaires seraient déployées à Komanda. Mais pour les populations, la confiance est rompue. Plus que de simples annonces, elles attendent des résultats, des arrestations, des protections tangibles.
Le président Félix Tshisekedi, sous pression croissante à l’approche de la fin de son mandat, se retrouve une fois de plus interpellé. “Il est temps de gouverner pour les vivants, et de rendre justice aux morts”, estime un évêque local.
Un tournant ou une répétition ?
Ce massacre de Komanda rappelle tristement les tueries de Beni ou les violences de Boga, perpétrées ces dernières années. Il confirme que ni la force militaire, ni les partenariats régionaux, ni la présence onusienne ne suffisent à eux seuls. Il faut un véritable sursaut d’État, appuyé par une réforme sécuritaire, une justice opérationnelle, et une diplomatie active face à un conflit qui n’a que trop duré.
Dans cette région de l’Afrique centrale longtemps oubliée, le droit de prier en paix est devenu un luxe dangereux. Et l’histoire récente prouve que l’impunité appelle toujours de nouveaux massacres.